J’ai assisté à une conférence-débat où une psychologue engageait le public à s’exprimer au sujet de la violence. En conclusion elle a fait une synthèse entre les opinions des présents et son propre point de vue.
Elle a estimé que la violence étant propre à la nature humaine, il n’était pas question de l’éradiquer mais plutôt d’en limiter les effets au moyen de la raison. Elle posait également de manière implicite que la violence relevait du mal alors que la raison relevait du bien, sans quoi l’argument ne tiendrait pas. C’est ainsi qu’elle en arrivait à lier raison et morale en inférant que la première débouchait sur la deuxième.
Je pense pour ma part que l’appel à la raison contre la violence doit être dépouillé de toute connotation morale, parce que d’une part la raison est amorale et que d’autre part la morale n’est pas raisonnable. Il y a à mon avis là une confusion des genres : soit on fait appel à la raison pour démontrer l’intérêt du sujet (l’homme violent), soit on fait appel à la morale pour démontrer le bénéfice de l’objet (la victime). Penser que ces deux intérêts peuvent coïncider est à mon avis angélique.
Le monde nous apparaît comme étant régi par la loi du plus fort au sens darwinien du terme. La violence en est l’expression. C’est le mécanisme dont se sert toute création, inerte, végétale, animale ou humaine pour s’adjuger le plus de place possible. C’est donc le sujet qui dispose de la plus grande force qui l’emporte, non pas parce qu’il en a décidé ainsi, mais parce qu’ainsi va le monde.
Je pense néanmoins que la raison bien comprise peut venir à bout de la violence.
L’homme diffère de l’animal en ce que ce dernier n’est mu que par ses émotions, incapable comme il est de se projeter dans le temps. L’animal pratique donc la violence dans l’immédiateté – parfois à son détriment – et de manière irréfléchie. L’homme, en revanche, est capable de se projeter dans le temps et d’anticiper les effets de sa violence. Un homme qui bat sa femme doit apprendre que ses coups pourraient l’éloigner de lui ou la tuer. S’il ne le craint pas alors il faut lui faire apparaître qu’il risque de finir en prison. Si cela non plus ne le dissuade pas alors il n’y a rien d’autre à faire que d’essayer de l’empêcher de nuire.
La raison appliquée à la lutte contre la violence, c’est peut-être la recherche d’un équilibre dans les rapports de force.
La morale, c’est autre chose.