Non à la GPA

Mon opposition à la GPA ne relève pas pour moi prioritairement de l’instrumentalisation des gamètes ou des mères porteuses, ni même de la sordidité de cette industrie. C’est ainsi que l’on ne peut exclure que moyennant les garde-fous nécessaires, la GPA ne finisse par être légalisée et légitimée dans un monde régi par les lois du marché. L’on ne peut pas non plus exclure qu’au bout du compte (c’est le terme qui convient) il s’avère que ces enfants ne se distinguent en rien de ceux qui ne relèvent pas du commerce.

Mais même dans ce cas, la question de fond demeure, qui est celle de ce que l’on appelle le droit naturel. Il s’agit de déterminer si du point de vue philosophique (et non pas scientifique) l’on peut d’office et d’avance priver un enfant du père ou de la mère dont il est biologiquement, socialement et culturellement issu. Délibérément fabriquer des orphelins de naissance, aussi aimés et heureux soient-ils, est moralement inacceptable, même quand cette manœuvre est objectivement réussie. La GPA est à mon sens inhumaine parce que transhumaniste.

La Loi du Retour

La « Loi du Retour[1] » a pour vocation d’accueillir tout Juif désirant s’établir en Israël. Elle stipule que « L’État déploiera des efforts pour garantir la sécurité des membres du peuple juif et de ses citoyens se trouvant en détresse ou privés de liberté en raison de leur judéité ou de leur citoyenneté ». Cette loi oblige l’Etat d’Israël à accorder de manière irréversible et immédiate la citoyenneté à tout Juif désirant immigrer, quelle qu’en soit la raison, qu’il soit en détresse ou pas, qu’ils soit persécuté ou pas en tant que Juif.

Mais tout droit suppose un devoir. Tout Juif qui se dit sioniste doit soutenir Israël en temps de guerre comme en temps de paix. Chacun selon ses moyens, son potentiel et ses compétences. Ceux éligibles à la Loi du Retour ont un devoir de réserve vis-à-vis du gouvernement d’Israël quel qu’il soit. Il est impensable qu’alors que le peuple d’Israël se bat pour maintenir le pays en état de marche, des Juifs à travers le monde soutiennent en public des discours hostiles à Israël, voire antisémites, et se réservent en même temps l’option d’immigrer en Israël à leur convenance, à leur heure ou par nécessité. La liberté d’expression est certes un droit de tout un chacun, mais l’Etat d’Israël a aussi celui de retirer à sa seule discrétion l’éligibilité à l’Alyah à quiconque jugé nuisible à Israël de manière manifeste.

La Loi du Retour concerne toute personne née de mère juive, ou convertie au judaïsme, ou dont l’un des quatre grands-parents est juif. Mais il faudrait également ouvrir l’Alyah à des personnes qui ne répondent pas à ces critères, mais  qui expriment le désir de partager la destinée du peuple juif. La définition de « Juif » au sens de la Loi du Retour n’étant de toutes manières pas conforme à la Halakha, il faudrait confier le soin de déterminer qui est juif à des institutions explicitement laïques qui cultivent une identité juive sans connotation religieuse.

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[1] La loi du retour votée en 1950 par le Parlement israélien garantit à tout Juif le droit d’immigrer en Israël.

La question démographique en Israël

Vers la fin du 20ème siècle, l’antisémitisme et le marasme de l’URSS et de ses satellites a suscité une émigration massive des Juifs vers Israël, mais elle est aujourd’hui pratiquement tarie.  La question se pose maintenant de savoir d’où pourrait bien venir un accroissement de la population juive par une nouvelle Alyah significative.

Il y a des communautés juives dans de nombreux pays, mais c’est aux Etats-Unis que les Juifs sont les plus nombreux, les plus dynamiques et les mieux intégrés. Mais en analysant le profil de cette communauté, on relève beaucoup d’analogies avec celle de l’Allemagne prénazie.  C’est ce genre de profil qui de tous temps a fini par se retourner contre les Juifs eux-mêmes, comme lors de l’Exode d’Egypte, de l’expulsion d’Espagne ou de la Shoah. Le massacre du 7 octobre a paradoxalement donné lieu à une flambée d’antisémitisme dans de nombreuses universités américaines, là-même où sont formées les élites de la nation. Une lame de fond hostile à la communauté juive, aussi prospère soit-elle, pourrait être suffisamment dérangeante  pour inciter de nombreux Juifs à faire l’Alyah[1].

L’Etat d’Israël est celui du peuple juif, mais il reconnaît l’existence de communautés ou d’ethnies composées de citoyens ayant leur culture, leur langue, leurs jours fériés et leur système d’éducation. Il faudrait donner la possibilité à tout citoyen israélien de changer de communauté pour s’intégrer à celle à laquelle il souhaite appartenir, moyennant une procédure appropriée. Cette possibilité existe dans une certaine mesure, mais elle passe dans la plupart de cas par une conversion religieuse. Il faudrait y ajouter un volet séculier permettant la transition d’une communauté à l’autre. Ce devrait être un droit, dont une des applications serait de donner aux couples mixtes la possibilité de déterminer à quelle communauté ils désirent associer leurs enfants.

 

La Loi du Retour

La « Loi du Retour[2] » a pour vocation d’accueillir tout Juif désirant s’établir en Israël. Elle stipule que « L’État déploiera des efforts pour garantir la sécurité des membres du peuple juif et de ses citoyens se trouvant en détresse ou privés de liberté en raison de leur judéité ou de leur citoyenneté ». Cette loi oblige l’Etat d’Israël à accorder de manière irréversible et immédiate la citoyenneté à tout Juif désirant immigrer, quelle qu’en soit la raison, qu’il soit en détresse ou pas, qu’ils soit persécuté ou pas en tant que Juif.

Mais tout droit suppose un devoir. Tout Juif qui se dit sioniste doit soutenir Israël en temps de guerre comme en temps de paix. Chacun selon ses moyens, son potentiel et ses compétences. Ceux éligibles à la Loi du Retour ont un devoir de réserve vis-à-vis du gouvernement d’Israël quel qu’il soit. Il est impensable qu’alors que le peuple d’Israël se bat pour maintenir le pays en état de marche, des Juifs à travers le monde soutiennent en public des discours hostiles à Israël, voire antisémites, et se réservent en même temps l’option d’immigrer en Israël à leur convenance, à leur heure ou par nécessité. La liberté d’expression est certes un droit de tout un chacun, mais l’Etat d’Israël a aussi celui de retirer à sa seule discrétion l’éligibilité à l’Alyah à quiconque jugé nuisible à Israël de manière manifeste.

La Loi du Retour concerne toute personne née de mère juive, ou convertie au judaïsme, ou dont l’un des quatre grands-parents est juif. Mais il faudrait également ouvrir l’Alyah à des personnes qui ne répondent pas à ces critères, mais  qui expriment le désir de partager la destinée du peuple juif. La définition de « Juif » au sens de la Loi du Retour n’étant de toutes manières pas conforme à la Halakha, il faudrait confier le soin de déterminer qui est juif à des institutions explicitement laïques qui cultivent une identité juive sans connotation religieuse.

[1] Terme désignant l’immigration en Israël par un Juif.

[2] La loi du retour votée en 1950 par le Parlement israélien garantit à tout Juif le droit d’immigrer en Israël.

L’Etat d’Israël et la Shoah

L’idée reçue selon laquelle la Shoah serait à l’origine, ou aurait été déterminante, pour la création de l’Etat d’Israël est une contrevérité et une offense faite aux héros du Yishouv qui ont lutté pour l’indépendance d’Israël en boutant les occupants britanniques hors de Palestine. La fable d’un Etat juif concédé en compensation de la Shoah est malveillante et tend à délégitimer Israël. Elle consiste à colporter l’idée que l’Occident aurait été pris de remords après la Shoah et se serait permis d’installer un Etat juif créé de toutes  pièces au Moyen-Orient sur un territoire volé aux Arabes.

Des historiens comme Georges Bensoussan[1] et Yehuda Bauer[2] ont démontré à quel point la marche vers la création de l’Etat d’Israël avait été sur le point d’aboutir avant la Seconde Guerre Mondiale. La sécurité sociale, les syndicats ouvriers, le système de transport, la police, l’université, la langue hébraïque, la technologie de pointe, l’agriculture intensive, le système politique, tous ces éléments d’un Etat en gestation étaient déjà en place avant la Shoah.

Bensoussan mentionne qu’après soixante ans de sionisme, des bataillons de jeunes Juifs d’Europe s’apprêtaient à faire l’ossature du futur Etat juif, mais sont partis en fumée dans les camps de la mort. Les mouvements sionistes en Europe comptaient près d’un million de membres, dont des dizaines de milliers s’initiaient à l’agriculture en vue de l’Alyah. Ils furent empêchés de rallier la Palestine et n’ont pas survécu à la guerre.

Pour Bauer le lien entre Shoah et l’Etat d’Israël est un mythe. Il rappelle qu’en Europe un tiers des Juifs vivaient sous le seuil de pauvreté et auraient émigré vers la Palestine si les frontières n’avaient été verrouillées par les Britanniques. Il estime que la Shoah a non seulement retardé la création de l’Etat d’Israël, mais a même manqué faire échouer le projet sioniste en tant que tel. L’Etat d’Israël n’est donc pas une conséquence de la Shoah, mais a au contraire vu le jour malgré la Shoah. C’est cette vérité historique qu’il faut transmettre aux jeunes générations, pour qu’ils ne grandissent pas avec l’idée qu’Israël est un pays de réfugiés.

[1] Historien spécialiste d’histoire culturelle de l’Europe des 19ème et 20ème siècles, en particulier des mondes juifs.

[2] Historien et universitaire spécialiste de la Shoah. Professeur à l’université hébraïque de Jérusalem.

Israël face au terrorisme

La peine de mort n’existe pas en Israël, comme dans la plupart des démocraties. Exécuter un être humain, aussi coupable soit-il, est un geste dégradant en soi, même quand il s’agit des criminels les plus abjects. Par ailleurs la peine de mort n’a pas vraiment de sens du point de vue logique, parce que le condamné ne souffre que durant la période qui s’écoule entre la sentence et l’exécution.  Vu sous cet angle la prison à perpétuité est une punition bien plus sévère.  En Israël même les terroristes les plus monstrueux finissent par sortir de prison, ou à être échangés contre des otages capturés par d’autres terroristes.  Une fois libérés il est fréquent qu’ils récidivent.

Les moyens conventionnels sont inopérants dans la lutte contre le terrorisme. Restent les unités spéciales qui ont des méthodes proches de celles des terroristes eux-mêmes. Elles s’efforcent de les combattre avec les moyens appropriés. Mais en plus du soutien logistique, matériel et financier, il faut que l’Etat donne à ces unités spéciales un soubassement éthique pour les conforter dans leur mission.

Il règne dans l’opinion publique un sentiment que les lois de la guerre ne sont pas efficaces quand il s’agit d’actes  terroristes, en particulier quand ils ont la dimension du génocide  du 7 octobre. Les forces antiterroristes devraient être maîtresses de leur action sur le terrain et libres de juger en temps réel du sort des terroristes. Les éliminer s’ils estiment que ceux-ci constituent ou continueront à constituer un danger.

Le droit est ainsi fait que l’on ne peut juger personne pour des crimes susceptibles d’être commis dans le futur. Mais concernant certains profils irréductibles il faudrait considérer que les neutraliser de manière préventive relève d’une forme de légitime défense. A noter que la traque par le Mossad des tueurs de «  Septembre Noir » après les Jeux Olympiques de Munich allait dans ce sens. Il faudrait donner cette même latitude et ce même mandat aux unités antiterroristes de notre époque.

Donc non à la peine de mort, mais mort aux terroristes.

L’antisémitisme n’est pas l’affaire des Juifs

L’idée que l’antisémitisme serait dû à l’ignorance ou à l’obscurantisme est fausse, même s’il est vrai qu’il y a des obscurantistes et des ignorants partout. La riposte à l’antisémitisme à travers le monde n’est ni dans l’éducation ni dans la laïcité ni dans l’humanisme ni dans l’antiracisme ni dans l’information ni dans la démocratie. Elle est dans l’Etat des Juifs. La logorrhée antisémite qui persiste en Occident est de même nature que celle qui a abouti à la Shoah. Les mêmes causes produiraient les mêmes effets si par malheur l’Etat d’Israël disparaissait.

La lutte contre l’antisémitisme n’est pas l’affaire des Juifs. Ils n’ont aucune prise sur ce fléau et aucun moyen de le combattre. Il n’y a d’ailleurs pas d’antisémitisme d’Etat dans le monde libre, et les autorités font généralement ce qu’elles peuvent pour le sanctionner. Mais le fait est qu’elles n’arrivent pas à juguler ce phénomène fabriqué par des siècles d’antijudaïsme  chrétien. Il est frappant d’observer que les manifestations contre l’antisémitisme en Europe ne mobilisent pas grand-monde excepté les Juifs eux-mêmes. Ces manifestations sont souvent pathétiques, tellement elles renvoient les Juifs à leur solitude. Une des raisons de la frilosité de la classe politique européenne à ce sujet est la crainte d’indisposer les musulmans, dix fois plus nombreux et soutenus par une gauche qui avance masquée sous couvert d’antisionisme.

L’Etat d’Israël doit faire entendre sa voix contre l’antisémitisme par les canaux diplomatiques d’usage, mais il n’est pas en son pouvoir ni de son  droit d’intervenir dans la politique intérieure des pays concernés. Israël peut et doit en revanche promouvoir l’Alyah auprès des Juifs à travers le monde qui estiment que leur qualité de vie, ou leur vie tout court, est compromise du seul fait d’être Juif.

L’institution judiciaire en Israël

L’institution judiciaire d’Israël est inspirée par le droit ottoman, anglais et aussi le droit international. La Cour Suprême en est la clé de voute. Elle est composée d’un panel de 15 juges nommés en fonction de leur expérience, de leur expertise et de leur intégrité.

Lors de la création de l’Etat d’Israël, la Cour Suprême avait pour  fonction principale de dire le droit dans des litiges d’ordre juridique.  Mais en 1992 une réforme a été adoptée par la Knesset sous l’impulsion du juge Aharon Barak. Cette réforme a ouvert la voie à de l’activisme judiciaire concernant les droits de l’homme et les libertés civiles, parfois contre l’avis de la Knesset ou du gouvernement.

Depuis la réforme Barak la Cour Suprême a compétence pour examiner des décisions de justice, des controverses légales, des pétitions, des questions relatives à la liberté d’expression et de culte, à la vie privée et à la protection des minorités. Elle a aussi pour mission de prévenir des abus de pouvoir, des nominations tendancieuses ou des décisions gouvernementales réputées déraisonnables. Elle peut s’autosaisir pour retoquer des lois votées par la Knesset, y compris des Lois Fondamentales.

Le processus de nomination des juges du système judiciaire est parfois critiqué pour une opacité qui permet des cooptations de fait. Le comité actuel de nomination des juges comprend deux députés de la Knesset, deux membres de l’Ordre des avocats, deux ministres et trois membres du système judiciaire. Comme l’Ordre des avocats se range traditionnellement du côte du système judiciaire, c’est lui qui prévaut en pratique.

En l’absence de Constitution, les juges sont en principe seuls face à leur conscience pour déterminer les valeurs sur lesquelles ils fondent leurs décisions. Mais depuis la réforme Barak, le système judiciaire est considéré comme plutôt progressiste, par opposition à une opinion publique plutôt conservatrice. Cela a fini par créer une tension qui a emmené le gouvernement de la 25ème Knesset à initier une réforme visant à réduire de manière significative le pouvoir de la Cour Suprême et à modifier le système de nomination des juges.

Le nouveau comité de nomination comprendrait le président de la Cour Suprême, deux juges à la retraite désignés par le ministre de la Justice, trois ministres dont deux choisis par le gouvernement en plus du ministre de la Justice, trois membres de la Knesset dont un député de la coalition, un de l’opposition et le président de la Commission des Lois.

L’équilibre des forces s’établirait alors à six sièges sur neuf pour l’ensemble exécutif et législatif, contre trois pour le judiciaire, ce qui revient à créer un système dont la sensibilité serait celle de la majorité au pouvoir. Cette réforme n’a pas abouti et a été remise en question suite à des manifestations d’ampleur et à la guerre consécutive au massacre du 7 octobre.

Si l’on permet à la Cour Suprême d’invalider à sa seule discrétion l’action de l’exécutif ou du législatif, cela revient à contredire la volonté populaire. D’un autre côté, s’il n’y a pas de mécanisme pour vérifier la raisonnabilité des décisions de l’exécutif il y a un risque de dérive autoritaire. Vu  l’absence de Constitution, le potentiel d’abus de pouvoir est donc manifeste dans les deux cas de figure. Le fait est que depuis que la droite est majoritaire dans le pays il arrive que la Cour Suprême se comporte comme une opposition politique, en particulier quand il s’agit de questions sociétales.

Le projet de réforme a provoqué  une fracture idéologique inquiétante dans la société israélienne, mais a paradoxalement fait émerger un consensus concernant la nécessité même de réformer l’institution judiciaire.

 

Séparation entre religion et Etat

Israël est l’Etat des Juifs, mais n’a pas de religion d’Etat. C’est une république de tradition juive dans le même sens que la France est une république de tradition chrétienne. Parmi les pères fondateurs de l’épopée sioniste il y eut Ben Gourion, politiquement à gauche, et Jabotinsky, politiquement à droite, mais ces deux personnages qui figurent parmi les penseurs les plus importants du sionisme, avaient comme point commun de connaitre la Torah par cœur et de ne jamais mettre les pieds à la synagogue.

La plupart des Juifs pratiquants sont attachés à la démocratie et ne considèrent pas que la Torah doive servir de fondement à la Loi ni à l’hypothétique Constitution qui peine à voir le jour. Par ailleurs, de nombreux Juifs sont non-pratiquants, voire athées, mais revendiquent leur appartenance au peuple juif au même titre et avec la même conviction que les pratiquants. A noter qu’il y a des Juifs ultraorthodoxes en Israël qui ne se considèrent pas comme partie prenante du projet sioniste. Certains sont même opposés à la notion d’Etat des Juifs. A noter en passant que Maïmonide, l’un des décisionnaires les plus importants de la Halakha[1], n’inclut pas dans son inventaire des 613 mitzvot l’obligation de vivre en Israël. Mais quoi qu’il en soit, l’Etat d’Israël en tant qu’avatar du Siècle des Lumières et de la Haskala[2] ne saurait être une théocratie.

Tout lien organique entre Etat et religion ne peut être que problématique. Certaines prérogatives des institutions religieuses peuvent être maintenues par pragmatisme, eu égard à l’Histoire, mais la vie publique doit être de nature séculière. En revanche il est important d’enrichir le droit israélien de principes du droit talmudique, en plus des sources anglaises et ottomanes.

Le sionisme est le mouvement de libération du peuple juif tout entier, et non pas de sa frange religieuse, même s’il est vrai que la Torah en est le mythe fondateur. Pour Yeshayahu Leibowitz[3] « L’État d’Israël n’a été créé ni à cause du judaïsme ni sous la pression du judaïsme ni dans l’intérêt du judaïsme, mais dans le cadre de l’indépendance nationale du peuple juif »[4].

C’est dans ce sens que Theodor Herzl[5] détermine dans « L’Etat des Juifs [6]» que la question juive n’est « ni une question sociale, ni une question religieuse, mais une question nationale.  Nous ne laisserons pas prendre racine les velléités théocratiques de nos rabbins. Nous saurons les maintenir dans leurs synagogues, de même que nous maintiendrons nos militaires dans leurs casernes. L’armée et le rabbinat doivent être respectés, mais au niveau de l’État ils n’ont rien à dire. »

[1] Ensemble des prescriptions et interdits de la Loi juive contenus dans le Talmud.

[2] Mouvement de pensée juif des 18ème et 19ème siècles influencé par les Lumières.

[3] Chimiste, médecin, historien de la science, érudit du judaïsme, Juif orthodoxe, philosophe et moraliste,  rédacteur en chef de l’Encyclopédie hébraïque.

[4] Leibowitz, Entretiens avec Michel Shashar, « Israël et Judaïsme, ma part de vérité ».

[5] Fondateur du mouvement sioniste au congrès de Bâle en 1897.

[6] « Der Judenstaat », publié en 1896

Israël Etat juif et démocratique

Il existe une tension naturelle entre démocratie et nation. Alors que la démocratie encourage la diversité, la nation tend à privilégier l’homogénéité. Chaque peuple a une Histoire spécifique avec laquelle la démocratie doit composer. C’est ainsi que l’on observe que l’application des principes démocratiques fondamentaux peut différer de manière significative d’un pays à l’autre.

Israël se veut « Etat juif et démocratique » selon la formule consacrée, mais cette formule suppose, pour le moins,  une hiérarchie dans les termes. A « Etat juif et démocratique », il faut ajouter « dans cet ordre ». Israël est d’abord l’Etat des Juifs ; c’est son essence. Le fait qu’il a vocation à être démocratique est consigné dans le projet sioniste et dans la déclaration d’indépendance, mais ce n’est pas sa raison d’être. Bien que le système de gouvernement d’Israël soit comparable à celui qui existe ailleurs dans le monde libre, il doit être en phase avec l’Histoire du peuple juif et sa spécificité.

Il ne faut pas que la vie démocratique relègue au second plan la judéité comme s’il s’agissait d’un folklore. Il faut se garder de suivre l’exemple des démocraties molles en Occident qui ont oublié leur fondement spirituel. Il y a de grandes démocraties, comme l’Inde ou le Japon, qui sont de plain-pied dans la modernité, mais qui en même temps sont fidèles à leurs racines.

L’Education Nationale doit favoriser la transmission des grands textes du judaïsme. L’enseignement de la Torah, du Talmud et de la pensée juive doit être substantiel  et intégré à tous les niveaux du système scolaire, tout en tenant compte des sensibilités religieuses et philosophiques. Les institutions religieuses ne doivent pas être seules à perpétuer ce précieux savoir comme s’il en avait le monopole. Par ailleurs, l’histoire du sionisme et celle de la révolution culturelle que constitue l’hébreu moderne et sa littérature doit faire partie du récit national.

Quant aux communautés arabes, druzes, tcherkesses ou autres, elles  sont libres de promouvoir un enseignement conforme à leurs traditions, mais dans le respect du caractère juif de l’Etat d’Israël.

La Cisjordanie ?

La Cisjordanie, de son vrai nom la Judée-Samarie, est, au mieux, un territoire disputé. En novembre 1947 l’Assemblée Générale des Nations-Unies adoptait la Résolution 181, non contraignante, suggérant d’établir à l’ouest du Jourdain deux Etats, l’un juif et l’autre arabe, en prévision du départ de Palestine des Britanniques. Les Juifs ont accepté, les Arabes ont refusé et tenté de s’emparer par la force de ce qui restait de la Palestine historique. Ce rejet du principe même d’un Etat juif et la détermination arabe de lui faire la guerre a rendu la Résolution 181 de l’ONU caduque.

En réalité la Jordanie est le véritable Etat des Palestiniens.  La majorité des Jordaniens sont ethniquement palestiniens et beaucoup ont des liens de famille avec ceux de  Cisjordanie, qui faisait partie de la Jordanie jusqu’à la Guerre des Six-Jours en 1967. Même après avoir perdu Cisjordanie, la Jordanie s’est alignée sur la résolution de la Ligue Arabe déclarant « non à la paix avec Israël, non à la reconnaissance d’Israël, non à la négociation avec Israël ». C’est suite à ce rejet qu’Israël a inauguré sa politique d’implantations, confirmée ensuite par tous les gouvernements successifs.

L’argument selon lequel Israël violerait le droit international en occupant la Cisjordanie est une mystification. Il n’y a rien qui permette de contester à Israël le contrôle de ce territoire à partir duquel la Jordanie a tenté de jeter les Juifs à la mer en 1967. Israël a d’ailleurs longtemps été disposé à le rétrocéder en échange d’un traité de paix, mais le Roi Hussein a préféré y renoncer pour inciter des Palestiniens à y créer un Etat hostile à Israël. Cela n’engageait en rien Israël, ni juridiquement ni moralement, et constitue une aberration du point de vue géopolitique.

Si la Cisjordanie d’aujourd’hui devenait indépendante, avec ou sans l’accord d’Israël, il est probable qu’elle reproduirait le précédent de Gaza, consistant à persévérer dans le rejet d’Israël. La revendication palestinienne d’un Etat entre Israël et la Jordanie  est un artifice cousu de fil blanc, parce que cette aspiration n’a d’autre moteur que la haine antijuive. La terrible vérité est que la majorité des Cisjordaniens et des Gazaouis sont en proie à une pathologie antisémite doublée d’un rejet de la modernité. L’idée reçue selon laquelle ils seraient manipulés par leurs  dirigeants, mais aspireraient en réalité à la paix avec les Juifs,  est une contrevérité. Tout comme les Allemands lors de la Shoah,  ces Palestiniens-là doivent être considérés comme globalement hostiles au peuple juif, même s’il y a comme partout des minorités lucides lors de psychoses de masse.

Aucune direction palestinienne ne peut fonder  sa popularité sur autre chose que la détermination de mener une lutte à mort contre Israël. Même les régimes du monde arabe qui aspirent à une normalisation avec Israël ont une crainte atavique de ce qu’on appelle « la rue arabe ». Nous assistons à un paradoxe nouveau, qui fait que les élites du monde arabe sont souvent plus pragmatiques et moins fanatiques que leur peuple.

Au fil du temps les implantations en Cisjordanie ont fini par constituer un problème pseudo-éthique et pseudo-juridique pour Israël. L’hostilité du monde arabe, la pression internationale, les dérives gauchistes, les attentats, l’antisémitisme endémique, les fractures au sein même de la société israélienne ont fini par rendre la situation d’une complexité sans nom faute d’horizon politique.

Une solution pourrait maintenant intervenir, consistant à diviser la Cisjordanie en deux en fonction de la sociologie des populations concernées. La partie majoritairement palestinienne retournerait à la Jordanie comme avant 1967, et la partie majoritairement juive serait intégrée à Israël. Une frontière serait convenue entre les deux Etats et éliminerait la ligne d’armistice de 1949. Cette solution est probablement la moins difficile et la plus raisonnable, et a l’avantage que ni la plupart des Palestiniens ni la plupart des Juifs n’auraient à quitter leur maison. Elle mettrait fin au statut d’apatride des Palestiniens qui acquerraient une dignité de citoyens d’un Etat, la Jordanie, qui est en paix avec Israël depuis des décennies.

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