L’activité bancaire devrait relever du service public, même au prix de perdre de son efficacité. Il y a quelques décennies, le téléphone, l’électricité, le gaz, la radio, la télévision, les compagnies aériennes et d’autres services appartenaient au service public. On n’était pas dans une économie étatisé pour autant. Plus tard on a fini par trouver qu’il fallait ouvrir ces activités au secteur privé en invoquant le principe de la concurrence, censée profiter au consommateur. Aux États-Unis les chemins de fer, les prisons, et même une partie de l’armée sont privatisés. Cela a pour résultat que les trains ne desservent que des routes rentables, que les prisons aspirent à un maximum d’embastillés, et que les mercenaires veulent un maximum de guerres. En Israël la Knesset a récemment torpillé de justesse un programme de prison privée, et c’est très bien ainsi. Je ne suis pas convaincu qu’il faille tout livrer à la concurrence dans un souci d’efficacité, sans quoi l’Etat ne servirait plus à rien. Pour revenir aux banques, je pense que la course à l’efficacité, contrairement à d’autres secteurs de l’entreprise, nuit à l’économie au lieu de l’aider, les profits qu’elles engrangent ne profitant pas à la collectivité.
Je pense que chacun est libre de risquer son argent, ce qui implique aussi que quand on s’en remet à des tiers il est du devoir de ces tiers d’informer leurs mandataires des risques qu’ils encourent. Mais le problème que je soulève concernant le système bancaire n’est pas celui de la fraude ni de l’abus de confiance, qui, cela va de soi, doivent être sanctionnés. Il s’agit de quelque chose de plus fondamental, qui fait que même quand les banques pratiquent la transparence, sont de bonne foi et s’entourent de précautions, le simple fait qu’il y ait des flux colossaux d’argent qui passent par leurs canaux entraîne qu’ils prélèvent une dîme qui à mon avis ne leur revient dans aucun cas de figure, parce l’État ne peut pas les laisser à leur sort, sauf exception (Lehmann Brothers, mais ce fut catastrophique).
Pour illustrer mon propos, il suffit de penser au Lotto. Il y aura toujours des gens pour y jouer, et il n’y a rien de mal à cela. Mais cela DOIT fonctionner comme une caisse appartenant à la collectivité. Il est anormal et immoral que le secteur privé en bénéficie. C’est pour cela que dans beaucoup de pays les Casinos sont interdits, et que dans ceux où ils sont autorisés c’est l’État qui prend la part du lion. Dans le même ordre d’idée, c’est dans ce sens-là que je pense que les banques ne méritent JAMAIS les bénéfices qu’ils font en pariant sur l’économie. Le système bancaire doit donc à mon avis être l’affaire de l’État parce que ce sont des entreprises qui jouissent d’un privilège régalien que rien ne justifie.