Lettre ouverte à Louise

Je partage beaucoup de valeurs avec vous, certainement en ce qui concerne  Israël et la judéité. J’ajoute que j’admire votre vitalité, votre énergie et votre belle plume.

Aujourd’hui j’éprouve le besoin de vous dire en toute amitié que je suis consterné par votre lecture des propos récents de Nadine Morano.

Votre hostilité au premier des ministres a déclenché chez vous une inflation verbale inouïe. Il se peut que vous ayez raison de penser que Manuel Valls a instrumentalisé l’incident à des fins politiques, mais dire que sa condamnation des déclarations de  Morano constitue une « mise à mort symboliquement aussi sanglante que celle des islamistes qui lapident et décapitent » est démesuré.

Vous comptez parmi celles et ceux qui savent ce que les mots veulent dire. Vous comprenez mieux que beaucoup d’autres que quand les ennemis d’Israël qualifient Tsahal de Nazie il y a là non seulement une dérive sémantique ignoble, mais aussi une dangereuse relativisation.

Toute forme de lynchage est à rejeter, mais affirmer que Valls a offert Morano  à la vindicte populaire est pour le moins discutable. Quoi qu’il en soit, poser comme vous le faites qu’il y a sanglante équivalence entre la démagogie éventuelle d’un homme politique français d’une part, et la banalisation islamiste de la lapidation et de la décapitation d’autre part, est proprement insoutenable.

Quant au fond de la polémique, Nadine Morano a tort, mille fois tort.

Tout citoyen a le droit d’exprimer son inclination envers ce qu’il considère comme la nature profonde de la nation à laquelle il appartient. Estimer que la France est un pays aux racines judéo-chrétiennes et tenir à perpétuer cet héritage est une aspiration respectable. Privilégier une vision politique plutôt qu’une autre est non seulement un droit mais une nécessité pour que vive la démocratie. Pratiquer l’une religion ou l’autre,  ou n’adhérer à aucune, relève de la conscience individuelle. Ces principes découlent de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, dont la France est signataire. Que l’on soit français depuis des générations ou pas n’y change rien, parce qu’il s’agit de règles de la vie en société au présent. A chacun de décider s’il veut s’y conformer, en échange de quoi il est citoyen parmi les citoyens en droit comme en devoir.

Mais personne ne peut décider d’être blanc.

La couleur de la peau ne peut en aucun cas constituer un filtre d’exclusion pour quoi que ce soit dans une civilisation digne de ce nom, or c’est ce qu’exige Nadine Morano  en déclarant dans un même souffle que les racines culturelles de la France et la couleur de la  peau sont autant de critères de sélection qui doivent avoir leur expression dans la politique d’immigration de la France.

Etre blanc n’est pas un trait culturel. Etre blanc n’est pas une valeur. Etre blanc n’est pas une philosophie. Etre blanc n’est pas une religion. Etre blanc n’est même pas beau, mais cela n’engage que moi.

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