Ury Avnery et les Juifs orientaux

Uri Avnery est un écrivain et journaliste israélien âgé de 93 ans. Il a récemment publié sa biographie, qui couvre donc l’Histoire d’Israël sur près d’un siècle.

Dans un passage où il évoque les Israéliens originaires du monde arabe, il s’interroge sur leur orientation politique, majoritairement à droite.

Page 444, tome I

« L’adhésion de la communauté juive orientale au camp nationaliste anti-arabe était pour moi incompréhensible. Le sort des Juifs du monde musulman avait été infiniment meilleur que celui de leurs frères de l’Europe chrétienne. Ils n’avaient rien vécu de comparable à l’Inquisition, à l’expulsion d’Angleterre ou d’ailleurs, aux massacres des Croisés, aux pogroms d’Europe de l’Est, sans parler de la Shoah. »

Avnery estime que les Israéliens d’origine orientale se sont trompés en ralliant la droite, mais il ne se pose à aucun moment la question de savoir si lui, ashkénaze allemand, a légitimité à penser à leur place.

La même question se pose d’ailleurs pour les immigrants d’URSS, qui se situent eux aussi massivement à droite de l’échiquier politique. Faut-il s’étonner qu’ils aient développé une détestation viscérale de tout ce qui ressemble à la gauche après avoir été persécutés en tant que Juifs dans la patrie même du socialisme ?

Il est vrai, les Juifs orientaux n’ont pas eu un sort aussi apocalyptique que ceux du monde chrétien, mais en déduire qu’ils n’avaient pas de raison d’en vouloir aux régimes arabes est une contre-vérité.

Au Moyen-âge, le statut de « dhimmi » leur interdisait de posséder des armes, de témoigner au tribunal ou  de monter à cheval. Ils devaient porter des signes distinctifs, étaient assujettis à une taxe spéciale et leurs habitations devaient être plus basses que celles des musulmans.

Au Yémen, les Juifs avaient pour tâche de vider les fosses d’aisance et de dégager les cadavres d’animaux.

Une grande partie de tout cela n’était plus d’application au 20e siècle, mais cette humiliation est restée ancrée dans la mémoire collective des Juifs d’Orient. Ce n’est qu’en ayant ce passé de « dhimmi » à l’esprit que l’on arrive à comprendre comment près d’un million de Juifs ont pu disparaître du monde arabe en moins d’une décennie.

La manière dont ils ont été chassés diffère d’une région à l’autre, mais le dénominateur commun est un antisémitisme remontant à l’époque du Prophète. Celui-ci avait voulu rallier les Juifs à l’islam, mais il s’est retourné contre eux quand il a compris qu’il n’y parviendrait pas.

Des communautés juives vivant depuis des temps immémoriaux en terre arabe ont été traquées, expulsées ou éliminées d’une manière ou d’une autre après la création de l’Etat d’Israël.

A noter qu’ils n’ont jamais bénéficié du statut de réfugiés de l’ONU, contrairement aux Palestiniens qui le conservent d’une génération à l’autre.

Uri Avnery ou l’art de se tromper

Uri Avnery est un écrivain et journaliste israélien âgé de 93 ans.  Il a récemment publié sa biographie, qui couvre donc l’Histoire d’Israël sur près d’un siècle. Cet énergique intellectuel a été de tous les combats d’Israël, depuis l’adhésion à l’Irgoun jusqu’à son militantisme pacifiste, en passant par le journalisme d’investigation et ses mandats de député à la Knesset. Ce qui est intéressant c’est qu’en essayant de démontrer le bien-fondé de ses convictions il nous donne l’occasion de les réfuter au moyen de son propre récit. Cet homme reste actif malgré son grand âge, mais ce qui est plus actuel c’est que ses idées persistent chez une partie de la gauche israélienne.

Page 188:

« Israël se situe en Asie. Notre espace naturel est arabo-musulman. Notre culture immémoriale est sémite et nous parlons une langue intimement liée à l’arabe, qui est à des années-lumière des langues européennes. J’avais la conviction que notre avenir était liée aux arabes et au continent Afro-asiatique. Si nous décidions de nous définir dans cet espace comme une bouture, comme une greffe sur un corps étranger, ce serait une calamité. Plus de soixante ans se sont écoulés depuis, mais je n’ai pas changé d’avis. »

Cette vision est une belle illustration de négation du réel. Quand le réel ne nous convient pas alors remplacons-le par une fiction, et alors tout redevient cohérent.

Dire que la culture immémoriale du Yishouv  était sémite est un outrage à l’Histoire. Pratiquement tous les pères fondateurs du sionisme étaient Ashkénazes, ainsi que la majorité des pionniers. Avnery parle l’hébreu avec un accent allemand, pratique l’anglais, est féru de littérature occidentale mais ne parle pas l’arabe. La culture britannique est d’ailleurs plus proche de son coeur que toute autre, et son rêve aurait été d’être gentleman anglais. Il s’est certes intéressé aux différentes ethnies de Palestine, mais indépendamment des sympathies qu’il ait pu éprouver à leur égard il n’a rien de commun avec le monde arabe. Contrairement aux aspirations personnelles d’Avnery, il faut garder à l’esprit que l’Etat d’Israël s’est dès le départ voulu une démocratie à l’occidentale, une nation de tradition juive, mais aussi héritière du Siècle des Lumières.

Que voulait donc Avnery ?

Qu’Israël se fonde dans un Moyen-Orient imaginaire au lieu de prendre acte de la réalité sur le terrain? Fallait-il que la nation israélienne en formation  qu’était le Yishouv se calque à tout prix sur ses voisins dans le seul but de s’intégrer? Renoncer à la démocratie,  à l’Etat de droit,  à l’égalité entre femmes et hommes,  à la liberté d’expression, au respect des cultes, à la protection sociale, au système de santé, à la libre circulation? Fallait-il qu’Israël laisse derrière soi ces acquis de la modernité au nom d’un hypothétique apaisement avec le monde arabo-musulman,  qui n’aurait d’ailleurs probablement jamais eu lieu si l’on considère le marasme d’alors qui n’a fait qu’empirer depuis? C’est cela que voulait Avnery ? Eviter la guerre entre Israël et ses voisins mais être mêlé aux conflits entre Arabes? S’allier aux Hachémites contre les Palestiniens ou aux Palestiniens contre les Hachémites? à l’Iraq contre l’Iran ou à l’Iran contre l’Iraq, à la Syrie contre le Liban ou au Liban contre la Syrie ? Aux Chrétiens contre les Musulmans ou aux Musulmans contre les Chrétiens? Aux Chiites contre les Sunnites aux Sunnites contre les Chiites ? Etc..?

Page 193

« C’est ainsi que cinq ou six ans avant l’avènement de l’Etat d’Israël j’en vins à conclure que celui-ci ne pourra se maintenir et se développer autrement qu’en faisant partie intégrante d’une entité régionale plus large. »

L’Histoire a démenti la prédiction d’Avnery sur toute la ligne. 67 ans après la Déclaration d’indépendance Israël est une démocratie certes perfectible, mais infiniment plus avancée que toutes les nations qui l’entourent. Contrairement à la prophétie d’Avnery, Israël s’est maintenu et développé sur tous les plans de manière exceptionnelle, alors que ses voisins se sont enfoncés dans un marasme dont on ne voit pas la fin. L’on pourrait opposer à cela qu’Israël a du faire face à des guerres à répétition, mais le fait est que ses voisins n’ont cessé de guerroyer entre eux ou d’être déchirés par la guerre civile, sans aucun lien avec le conflit israélo-arabe. Il faut faire preuve de beaucoup d’imagination pour estimer que si Israël avait été lié de manière organique à ses voisins il aurait échappé à l’embrasement de la région. Il est beaucoup plus logique de conclure que c’est justement parce qu’Israël relève d’un autre culture, d’une autre civilisation et d’autres alliances qu’il n’a pas été entraîné dans le chaos du Moyen-Orient.

La biographie d’Ury Avnery est certes l’histoire d’un homme de bonne volonté, mais qui s’est beaucoup trompé. Nul mieux que lui-même n’aurait pu le démontrer .

Le chef de l’opposition israélienne à Paris

« Avoda », le Parti israélien membre de l’Internationale socialiste fut la maison idéologique de nombreux hommes politiques de gauche, dont Ben Gourion et Itzhak Rabin. De nos jours c’est Itzhak Herzog qui est le dirigeant de cette formation, ce qui fait de lui également le chef de l’opposition au Parlement.

C’est à ce titre que Herzog a récemment fait une visite officielle en France, où il a été reçu par le président François Hollande. A propos du conflit israélo-palestinien il a fait la déclaration suivante: « La tentative de créer un Etat palestinien aujourd’hui est irréaliste. Un Etat palestinien ne peut être édifié maintenant, car les Palestiniens ne disposent pas actuellement d’un leadership qui contrôle l’ensemble de leurs territoires et qui pourrait suivre une telle démarche ».

Cette mise au point est intéressante pour quiconque serait tenté de croire qu’il existe une divergence de fond entre le chef de l’opposition et le gouvernement en place concernant l’avenir des territoires occupés.  En réalité Herzog a la même analyse que Benjamin Netanyahu, à savoir que Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité Palestinienne, n’a aucune intention d’aboutir à un accord avec Israël. Au lieu de cela il se cantonne dans un immobilisme prudent tout en comptant sur l’Iran, le Hamas, le Hezbollah, Al Qaeda ou Daesh pour venir à bout d’Israël.

Il est avéré depuis longtemps que l’opinion publique israélienne est majoritairement en faveur d’une fin de l’occupation en échange de frontières sûres et reconnues. L’occupation de la Cisjordanie est exigeante, pèse sur l’économie, pose un problème moral et est un facteur de tension au sein de la société israélienne elle-même.

Mais bien que le gouvernement d’Israël tout comme la gauche travailliste soient favorables à la création d’un Etat palestinien, ils sont d’accord pour estimer que les leaders palestiniens n’en ont ni la vision, ni la volonté ni le courage politique, ce qui rend la chose irréaliste dans la situation actuelle.

Il faut comprendre que quand la France fait pression sur Israël pour promouvoir la solution de « deux Etats pour deux peuples », il y a un de ces peuples qui n’en veut pas, or ce n’est pas celui que l’on croit.

Que ce soit la volonté des Palestiniens ou celle de ses leaders que de refuser de partager la Palestine avec les Juifs depuis 1947, le fait est qu’ils ne veulent pas s’asseoir autour d’une table pour négocier leur propre indépendance. Ils préfèrent courir le monde pour promouvoir la fiction d’une Palestine de papier et perpétuer le conflit plutôt que d’assumer les droits et les devoirs d’une Palestine réelle vivant en paix à côté d’Israël.

Gaza et Molenbeek, même combat.

Le monde découvre avec stupeur l’existence de Molenbeek, cette obscure commune de l’agglomération bruxelloise devenue sanctuaire islamiste et repaire d’assassins. Il est vrai qu’après les attentats de Paris les autorités belges sont intervenues de manière musclée, mais le rôle des forces de l’ordre est comparable à celui des pompiers: on les appelle généralement quand l’incendie s’est déjà déclaré, c’est-à-dire trop tard.

Dans un société démocratique, prévenir le terrorisme consiste à ne pas transiger sur certains principes. De ce point de vue l’Europe a failli en fermant les yeux sur l’islamisme, dont les objectifs sont pourtant clairs. Penser que Paris pouvait échapper à cette calamité est d’un coupable aveuglement.

Tous les musulmans ne sont pas islamistes, mais il n’en est pas moins vrai que tous les islamistes vivent comme des poissons dans l’eau parmi les musulmans. Il y a une espèce d’omerta qui tétanise ces populations, dont on ne distingue pas bien si elle repose sur une adhésion tacite, une complaisance criminelle ou une terreur indicible.

Il y a une sorte de schizophrénie en Europe à ne pas admettre que les forces islamistes qui appellent à liquider Israël sont les mêmes que celles qui mettent des salles de spectacles et des restaurants à feu et à sang à Paris.

Le grand public a pu croire que les attentats visant l’Hyper Casher ou Charlie-Hebdo signalaient ce qu’il fallait ne pas être pour se sentir en sécurité en France. Le grand public a pu le croire, mais les autorités sont impardonnables de l’avoir cru. Certains ont même cru bon de suggérer que ne plus porter de kippa et ne plus s’en prendre au Prophète rétablirait le calme. Ces jours-ci le gouvernement belge a même franchi un nouveau pallier: ne plus aller au cinéma, ni aux compétitions sportives, ni à l’école. Pour le moment il semble encore permis de respirer, mais allez savoir ce que les politiciens vont encore trouver avant d’aller à l’essentiel.

Nous savons depuis la Shoah que l’antisémitisme est le plus sûr indice d’une société qui perd ses repères. Aujourd’hui c’est l’antisionisme – avatar de l’antisémitisme – qui joue ce rôle. Le parti-pris antisioniste d’une majorité d’intellectuels et de journalistes en Europe est inquiétant non seulement pour Israël, mais pour le monde libre lui-même. Faire une différence entre le Hezbollah, le Hamas et l’Iran d’une part, et Daesh et Al Qaeda d’autre part n’a aucun sens, parce que l’islamisme est une idéologie qui n’a ni feu ni lieu. Son ennemi est le genre humain tout entier, ce qui inclut les terroristes eux-mêmes, qui considèrent la mort – celle des autres comme la leur – comme valeur suprême.

Si l’Europe ne prend pas la mesure de ce fléau, les choses n’en resteront pas là, parce que les Djihadistes ne savent que trop bien avec quelle facilité ils peuvent opérer dans un Etat de droit. C’est pour cela qu’il y va de l’intérêt de l’Europe que de soutenir l’Etat d’Israël et de cesser de le stigmatiser avec des directives bêtes et méchantes comme l’étiquetage de produits de Cisjordanie. Il n’est pas anodin de noter que les  responsables politiques français ont voté cette ignominie qui a englouti des fortunes en commissions spéciales et en consultants, alors qu’au même moment des Djihadistes s’apprêtaient à exterminer des Parisiens à la Kalachnikov.

Ces mêmes Djihadistes qui de Tel Aviv à Paris sèment la mort partout où il y a des vivants; qui non seulement prônent que la fin justifie les moyens, mais que les moyens sont en eux-mêmes une fin; qu’il s’agit moins pour eux de s’emparer du monde que de le quitter avec éclat; que le paradis au ciel vaut bien l’enfer sur terre.

l’Europe a le devoir de soutenir cette minuscule démocratie qu’est l’Etat d’Israël confronté à une guerre dont l’Europe n’entend que les bruits de bottes mais qui deviennent de plus en plus audibles. A bon entendeur salut.

Israël et Europe, même combat.

Lucy Aharish or Israel’s Pasionaria

Lucy Aharish is a symbol of paramount importance to Israel. This charismatic, eloquent, courageous and smart intellectual is a graduate of political science and journalism, and leads a brilliant career as a columnist in several media, among which I24 News. Her appearances fascinates viewers who often learn more from her about Israeli reality that from the versatile press where commentators  mainly compete between them with slogans.

When asked to define her identity, Aharish says she is an Israeli, a woman, an Arab and a Muslim, “in that order,” she emphasizes. But when compelled to respond more accurately she exclaims she is “neither an Arab nor a Jew. Neither Christian, nor Muslim nor Druze nor Buddhist nor Circassian. Neither left nor right. Neither religious nor secular. That she doesn’t want to see children kidnapped and murdered. That she doesn’t want to see children burnt to death. That she doesn’t want to hear sirens or see missiles launched … That she wants us to open our eyes to the rage and hatred that are eating us alive.”

Aharish’s tone, freshness and fervor is unprecedented in Israeli media. Despite the prejudices that could have hindered her way up, she managed to overcome them through years of work and perseverance. During her shows she challenges her guests with both disarming and insightful style, whether they are Hamas representatives, Jewish fundamentalists or prominent Americans. She does it in their native languages, which she masters to perfection.

Aharish stresses she represents herself only. She claims she is an Arab Muslim, but refuses to be locked into clichés. On the one hand, she vigorously slams Palestinian leaders’ strategy, which she deems a non-starter, but, on the other hand, she strongly criticizes the discrimination of Israeli Arabs.

Israel is home to this lady just like it is for millions of Arab and Jewish citizens. But Aharish is neither suicidal nor quixotic. She comes across flamboyantly on the Israeli public arena, she is talented and bright, so she is unlikely to let herself corner if she realizes that her struggle may lead to a dead end.

Aharish is under relentless attack by a certain right, a certain left and also from many Arabs. As she is a unique asset for Israeli society, it would be a considerable waste if she chose to leave Israel in order to get away from domestic hostility.

This does not take away that many Israelis admire her, support her and approve of her stance. If she decided to leave it would be a very bad sign for the Israeli democracy. This ambitious woman is far from having deployed her full potential, so if she nevertheless felt an urge to go abroad, it might be a good idea for the government to offer her the position of Israel’s ambassador at the United Nations.

Netanyahu and the Grand Mufti

A media storm has stricken the Prime Minister of Israel Benjamin Netanyahu following his statements at the Zionist Congress gathering in Jerusalem. Netanyahu said that « Hitler had no intention of exterminating the Jews at that time.[1] He wanted to expel them. The Grand Mufti of Jerusalem[2] went to meet Hitler in order to tell him « If you expel the Jews, they will all go there [to Palestine].” Hitler asked him « then what should I do with them ? » “burn them,” replied the Grand Mufti.

Journalists, chroniclers, intellectuals and historians of various horizons became plagued by a collective hysteria. Netanyahu was accused of ignorance, Holocaust denial, inciting hatred, clearing the Nazis and political opportunism. Even the German Chancellor felt she had to emphasize that the Germans were indeed responsible for the Holocaust. Almost no one bothered to actually focus on Netanyahu’s statements with discernment or to verify them, even though his sources are freely available.

Mohammed Amin al-Husseini was Grand Mufti of Jerusalem from 1921 until the proclamation of the State of Israel in 1948. Close to the Muslim Brotherhood, he did not only favor the liquidation of the Palestinian Jews, but also to that of Jews worldwide. He is one of the spiritual fathers of the radical Islam of our times, which calls for the eradication of Israel and the extermination of Jews wherever they may be. Mohammed Amin al-Husseini is nevertheless worshipped by the Palestinians as a national hero and remains a reference on religious matters.

Not surprisingly was the Grand Mufti impressed by the Nazis when they came to power in 1933, so much so that he became the greatest collaborator in the Arab world.[3] As a reward he was consecrated « Honorary Aryan » and swore allegiance to Hitler, declaring « the Arab nations are convinced that Germany will win the war. They are Germany’s natural allies because they have common enemies, namely the British, the Jews and the communists. Therefore they are wholeheartedly prepared to cooperate with Germany and join them in the war, namely by forming an Arab legion. » He fulfilled this promise by creating an Arab section of the Waffen SS.[4]

The philosopher Hannah Arendt recalls that during Eichmann’s trial[5] « the Grand Mufti’s connections with the Nazis were public knowledge since he was expecting them to help him implement a variation of the Final Solution in the Middle East. »[6]

After the war the Grand Mufti took refuge in Paris under the complacent eye of the local authorities, even though he was wanted by Great Britain and Yugoslavia as a war criminal. France refused to extradite him by fear of the Arab world, and ended up by letting him escape with the complicity of the Foreign Ministry[7] which provided him a false passport.

Dieter Wisliceny, one of Eichmann’s aides, testified at the Nuremberg trials that « The Grand Mufti had suggested exterminating the Jewish people to Hitler, Ribbentrop, and Himmler on many occasions because he considered this was the best way to solve the Palestinian problem.”[8] Numerous comments aired by the Grand Mufti from his exile in Germany reveals his support for the Final Solution.[9] In his radio broadcasts aimed at the Arab world he incited them to « kill the Jews wherever they are, because that is God’s will. »

There is no doubt that when the Nazis came to power they firmly intended to get rid of the Jews. However It may well be that they never thought through where this could lead a decade later. They were convinced at the time that by making life impossible for the Jews these would end up leaving, as they had done during their expulsion from Spain five centuries earlier.

The 1935 Nuremberg racial laws brought about a general boycott on Jews, their dismissal from civil service, disbarment of lawyers, exclusion of doctors, banning of artists, firing of journalists, a ban from health resorts, cinemas, libraries and public transport, not to forget random pogroms.

During this period, Eichmann was instructed to take Zionism on board as a means to promote emigration of the Jews to Palestine. He contacted Zionist circles in order to speed up the process, and in 1937 he traveled to Palestine to inquiry about the issue, after which he undertook to intensify the emigration. His achievements were highly praised by his superiors, and his methods were seen as a model for handling Jewish affairs. He was entrusted with organizing compulsory emigration through a mixture of terror and chicanery.[10]

The « Haavara » was an agreement finalized in 1933 between the Nazi regime and the Zionist Federation of Germany. It consisted in facilitating transfer of Jewish property to Palestine in order to encourage Jews to settle over there. From the Nazi point of view this was a smooth way to rid Germany of the Jews. Werner Otto Von Hentig, a high-level official in charge of Palestinian affairs strongly supported the creation of a Jewish state in Palestine. More than 50.000 Jews managed to emigrate based on this agreement, which remained in force until 1942, the year of the Wannsee Conference.

In 1938, Eichmann drafted a memorandum to support Jewish emigration outside Europe[11] and was instructed to coordinate the deportation of four million people to Madagascar. He created a dossier outlining the transportation of one million Jews per year. The plan would deprive them from their belongings in order to finance the logistics, after which they would be forced to emigrate. The SS would be in charge of deporting the Jews to the island and administrating it. However Madagascar was then under British control, and since the Germans never managed to drive them out, this plan was never enacted.

Eichmann continued to support emigration by other means, and worked with Zionist smugglers in order to drive Jews to Palestine. Furthermore the Nazis also envisioned expelling Jews to Russia once the Red Army would be defeated.[12]

The Grand Mufti’s meeting with Hitler was driven by his concern regarding the consequences of a possible expulsion of the Jews from the Reich, many of whom were likely to end up in Palestine, thus strengthening the Yishuv.[13]

However this prospect was no longer an option in 1941 because the British had barred the Jews to immigrate in Palestine by means of the White Paper[14]. As no other country was prepared to welcome Jews anyway, the Nazis concluded that the only remaining solution, which had to be final, consisted in systematically and industrially exterminate them.

Netanyahu rightly pointed out that at the time of the meeting between the Grand Mufti and Hitler the Nazis were still expelling Jews, although it is true that random killings of civilians had already begun wherever the Nazis took control.

What Netanyahu wanted to highlight was that the Grand Mufti and Hitler had theorized their anti-Semitic psychosis long before the Holocaust, but that the Grand Mufti was the first to envision a genocide as early as in the 1920’s with regard to the Jewish presence in Palestine. Netanyahu never stated the Grand Mufti gave Hitler the idea of the Final Solution, but rather that he played an important role by campaigning relentlessly against Jewish emigration from Germany.

Finally, Netanyahu wanted to portray the implacable nature of the fascist, Nazi, and anti-Semitic ideology incarnated by the Grand Mufti, who is at the heart of the current Intifada of the Knives.

[1]« That time » refers to the meeting between the Grand Mufti and Hitler in 1941. Most commentators seem to have ignored this point. Without this Netanyahu’s sentence would have had a quite meaning.

[2] A mufti is a Muslim cleric who has the authority to issue fatwas. In each state of the Ottoman Empire, the Grand Mufti was the supreme religious authority in the country.

[3] Study by Matthias Küntzel published in the Jewish Political Studies Review

[4] A Nazi paramilitary and police organization

[5] A Nazi war criminal responsible for the logistics of the Final Solution

[6] Eichmann in Jerusalem : Report on the Banality of Evil by Hannah Arendt

[7] Tsilla Hershco: « The History of an Escape [archive] », Controverses, n°1, March 2006.

[8] Zvi Elpeleg, Hamufti Hagado 1989, pp. 74,75

[9] Zvi Elpeleg, Through the Eyes of the Mufti: The Essays of Haj Amin

[10] David Cesarini(September 5, 2013). Adolf Eichmann

[11]David Cesarini(September 5, 2013). Adolf Eichmann.

[12]                 David Cesarini(September 5, 2013). Adolf Eichmann.

[13]                 The term Yishuv refers to the Jewish community in Palestine before the creation of the state of Israel.

[14]                 In May 1939, when the Jews were being persecuted by the Third Reich, the British reduced their access to Palestine by draconian measures.

Lucy Aharish ou la pasionaria d’Israël

Lucy Aharish est un symbole de première importance pour Israël. Diplômée de sciences politiques et de journalisme, cette jeune intellectuelle est charismatique, éloquente, courageuse et intelligente. Elle mène une brillante carrière de chroniqueuse dans plusieurs médias, dont I24 News. Ses interventions prennent les téléspectateurs aux tripes et nous apprend souvent plus sur la réalité israélienne que cette presse versatile où journalistes de tous bords se font concurrence à coups de slogans.

Quand on lui demande de définir son identité elle répond qu’elle est israélienne, femme, arabe et musulmane, « dans cet ordre », précise-t-elle. Mais quand on la pousse dans ces retranchements, elle finit par s’écrier qu’elle « n’est ni arabe ni juive ni chrétienne ni musulmane ni druze ni bouddhiste ni circassienne ni de gauche ni de droite. Qu’elle en a assez de voir des enfants enlevés, assassinés ou brûlés vifs. Qu’elle ne veux plus entendre hurler des sirènes ni voir des missiles déchirer le ciel. Qu’il faut prendre conscience de cette rage et de cette haine qui est en train de nous détruire. »

Aharish a un ton, une fraîcheur et une intensité sans précédent dans le monde médiatique israélien. Malgré les préjugés qui auraient pu entraver son ascension, elle a réussi à s’imposer à force de persévérance. Lors de ses émissions elle interpelle avec un naturel désarmant et incisif aussi bien des représentants du Hamas que des fondamentalistes juifs que des personnalités américaines, le tout dans leurs langues respectives, qu’elle maitrise à la perfection.

Aharish prend soin de ne représenter qu’elle-même. C’est une arabe musulmane mais elle refuse de se laisser enfermer dans des clichés. D’une part elle ne craint pas de critiquer la politique des dirigeants palestiniens, dont elle estime qu’elle ne mène à rien, et d’autre part elle fustige la discrimination que subissent les arabes d’Israël.

Israël est la maison de cette femme sans peur et sans reproche, tout comme celle de ses millions de concitoyens arabes ou juifs. Mais Aharish n’est ni suicidaire ni donquichottesque. Elle évolue avec panache dans l’espace public israélien, mais c’est quelqu’un de talentueux et de brillant qui ne se laissera pas consumer si son combat mène à l’impasse.

Elle constitue un atout unique pour la société israélienne, or ce serait un immense gâchis si d’aventure elle choisissait de s’expatrier pour échapper à l’hostilité de certains milieux. Elle est en effet la cible à la fois d’un certaine droite, d’une certaine gauche et de beaucoup d’arabes toutes tendances confondues.

Cela n’empêche pas de nombreux israéliens d’être subjugués lors de ses interventions publiques. Si un jour elle décidait de partir sous d’autres cieux ce serait très mauvais signe pour Israël. Cette femme ambitieuse est loin d’avoir déployé tout son potentiel, alors si malgré tout elle éprouvait le désir de s’éloigner alors ce serait peut-être une bonne idée de lui proposer le poste d’ambassadeur d’Israël à l’ONU.

Netanyahu et le Grand Mufti

Un orage médiatique s’est abattu ces jours-ci sur le Premier Ministre d’Israël Benjamin Netanyahu suite à ses propos tenus en anglais lors d’une conférence du Congrès Sioniste à Jérusalem. En voici la traduction:

« Hitler n’avait pas l’intention d’exterminer les Juifs à cette époque [1]. Il voulait les expulser. Le Grand Mufti de Jérusalem[2] alla trouver Hitler pour lui dire « si vous expulsez les Juifs ils iront tous là-bas [en Palestine]. Hitler lui demanda « mais alors que dois-je faire d’eux »? Les bruler, répondit le Grand Mufti « .

Suite à cela, journalistes, chroniqueurs, intellectuels d’obédiences diverses et historiens de tous bords ont été pris d’hystérie collective. Netanyahu a été accusé d’ignorance, de négationnisme, d’incitation à la haine, de déculpabilisation des Nazis et d’opportunisme politique. La Chancelière d’Allemagne s’est même crue obligée de préciser que c’étaient bien les Allemands qui avaient été responsables de la Shoah. En réalité, pratiquement personne ne s’est donné la peine d’écouter avec discernement les propos de Netanyahu ni de les vérifier, alors qu’il s’agissait d’une vérité à la portée de tous.

Mohammed Amin al-Husseini fut le Grand Mufti de Jérusalem de 1921 jusqu’à la proclamation de l’Etat d’Israël en 1948.   Proche des Frères musulmans, il était non seulement favorable à la liquidation des Juifs de Palestine, mais aussi à celle des Juifs du monde entier. C’est le père spirituel de l’islamisme radical de notre époque, qui appelle à éradiquer Israël et à exterminer les Juifs où qu’ils soient. Mohammed Amin al-Husseini est considéré par les Palestiniens comme un héros national et une référence en matière religieuse.

C’est tout naturellement que le Grand Mufti fut séduit par les Nazis dès leur arrivée au pouvoir en 1933, et qu’il devint le plus grand des collaborateurs dans le monde arabe[3]. En récompense, il obtint le titre d' »Aryen d’honneur » et prêta allégeance à Hitler en déclarant que « les nations arabes sont convaincues que l’Allemagne va gagner la guerre. Ils sont les alliés naturels de l’Allemagne puisqu’ils ont les mêmes ennemis, à savoir les Anglais, les Juifs et les communistes. Ils sont donc prêts à coopérer de tout cœur avec l’Allemagne et à participer à la guerre, notamment en constituant une légion arabe« . Il mit cette promesse en pratique en créant une section arabe de la Waffen SS[4].

La philosophe Hannah Arendt releva au cours du procès Eichmann [5]que « les connexions du Grand Mufti avec les nazis étaient de notoriété publique, parce qu’il espérait qu’elles l’aideraient à exécuter une variante de la Solution Finale au Proche-Orient « [6].

Après la guerre, le Grand Mufti se réfugia à Paris sous l’œil complaisant des autorités, bien qu’étant recherché comme criminel de guerre. La France ne l’inquiéta pas, refusa de l’extrader, et craignant le monde arabe, finit par le laisser s’échapper avec la complicité du Quai d’Orsay[7], qui lui fournit un faux passeport.

Dieter Wisliceny, adjoint d’Eichmann, témoigna au tribunal de Nuremberg que « le Grand Mufti avait suggéré à plusieurs reprises à Hitler, Ribbentrop et Himmler d’exterminer le peuple Juif, considérant que ceci constituait la meilleure solution pour résoudre le problème palestinien[8]« . Les nombreux commentaires du Grand Mufti diffusés à partir de l’Allemagne exprimaient son soutien à la Solution Finale[9]. Dans ses émissions radiophoniques en direction du monde Arabe, il incitait à « tuer les Juifs où qu’ils se trouvent parce que c’est la volonté de Dieu ».

En accédant au pouvoir en 1933, les Nazis avaient fermement l’intention de se débarrasser des Juifs, tout en n’imaginant peut-être pas où cela allait les mener une décennie plus tard. Ils étaient persuadés à cette époque qu’en rendant la vie impossible aux Juifs, ceux-ci finiraient par partir, comme ce fut le cas lors de l’expulsion d’Espagne cinq siècles plus tôt.

Les lois raciales de Nuremberg de 1935 entrainèrent pour les Juifs le boycott, la révocation de la fonction publique, la radiation des avocats, l’exclusion des médecins, la mise au ban des artistes, le renvoi des journalistes, l’interdiction des stations thermales, des cinémas, des bibliothèques et des transports publics, le tout accompagné de pogroms.

Au cours de cette période, Eichmann fut chargé de prendre en compte le sionisme comme moyen de promouvoir l’émigration des Juifs vers la Palestine, et noua des contacts avec des milieux sionistes afin d’accélérer le processus. En 1937 il fit un voyage en Palestine pour étudier la question, après quoi il entreprit de stimuler l’émigration. Ses exploits furent applaudis par ses supérieurs et ses méthodes prises comme modèle pour la gestion des affaires juives. Il reçut la charge d’organiser l’émigration forcée avec un mélange de terreur et de chicanerie[10].

La « Haavara » fut un accord conclu en 1933 entre le régime nazi et la Fédération sioniste d’Allemagne, consistant à faciliter le transfert de biens juifs vers la Palestine afin d’inciter les Juifs à s’y établir. Cette formule était du point de vue nazi un moyen élégant de se défaire des Juifs du Reich. Werner Otto Von Hentig, haut fonctionnaire en charge des questions palestiniennes, soutint d’ailleurs avec force la création d’un État juif en Palestine. 50 000 Juifs parvinrent à y émigrer grâce cet accord, qui resta en vigueur jusqu’en 1942, année de la Conférence de Wannsee.

En 1938 Eichmann établit un mémorandum pour encourager l’émigration juive hors d’Europe[11] et fut chargé d’organiser la déportation de quatre millions de personnes à Madagascar. Il produisit un dossier prévoyant le transport annuel d’un million de juifs. Le plan prévoyait de les spolier pour financer la logistique, après quoi ils seraient forcés d’y émigrer. La SS s’occuperait du ramassage en Europe et de l’administration de l’île. Mais comme Madagascar était sous le contrôle des britanniques et que les Allemands n’arrivaient pas à les en déloger, ce plan ne vit jamais le jour.

Eichmann continua néanmoins à soutenir l’émigration par d’autres moyens, et travailla avec des passeurs sionistes pour expédier des Juifs en Palestine. Par ailleurs les autorités nazies envisagèrent un temps de les expulser vers la Russie, une fois que l’Armée rouge serait vaincue[12].

La démarche du Grand Mufti chez Hitler fut donc bel et bien l’expression de son inquiétude par rapport aux conséquences d’une éventuelle expulsion massive de Juifs du Reich, dont un nombre non négligeable risquait d’aboutir en Palestine et de renforcer ainsi le Yishouv[13].

Il s’avéra plus tard que cette perspective n’était plus à l’ordre du jour en 1941, parce que les Britanniques avaient verrouillé la Palestine au moyen du Livre Blanc[14] et qu’aucune autre puissance n’était disposée à accueillir les Juifs. C’est alors que s’imposa chez les Nazis la conviction que la seule solution restante, qui devait être finale, serait d’exterminer les Juifs de manière systématique et industrielle.

Netanyahu a donc raison de rappeler qu’au moment de la rencontre entre le Grand Mufti et Hitler, les Nazis en étaient encore à expulser les Juifs, même s’il est vrai que des tueries avaient commencé, encore que les meurtres de civils par les Allemands faisaient rage partout où ils mettaient les pieds.

Ce que Netanyahu a voulu mettre en évidence dans son discours, c’était que le Grand Mufti et Hitler avaient théorisé leur délire antisémite bien avant la Shoah, mais que le Grand Mufti avait été le premier des deux à envisager un génocide dès les années 1920, eu égard à la présence juive en Palestine. Netanyahu ne dit en revanche pas que c’est le Grand Mufti qui a donné à Hitler l’idée de la Solution Finale, mais bien qu’il a eu un rôle important dans sa promotion en s’opposant à l’émigration juive vers la Palestine.

Enfin Netanyahu a voulu rappeler la nature irréductible du courant fasciste, nazi et antisémite incarné par le Grand Mufti, dont l’idéologie irrigue et inspire en ce moment même l’Intifada des couteaux.

[1] « Cette époque » renvoie à l’entrevue entre le Grand Mufti et Hitler en 1941. La plupart des commentateurs semblent avoir ignoré ce point. Sans cette précision la phrase de Netanyahu aurait eu un tout autre sens.

[2] Un mufti est un religieux musulman qui a l’autorité d’émettre des fatwas. Dans chaque État de l’Empire ottoman le Grand Mufti était la plus haute autorité religieuse du pays.

[3] Etude de Matthias Küntzel publiée dans Jewish Political Studies Review

[4] Organisation paramilitaire et policière nazie

[5] Criminel de guerre nazi responsable de la logistique de la Solution Finale

[6] Eichmann à Jérusalem : rapport sur la banalité du mal de Hannah Arendt

[7] Tsilla Hershco: Histoire d’une évasion [archive], Revue Controverses, n°1, mars 2006.

[8] Zvi Elpeleg, Hamufti Hagado 1989, p. 74,75

[9] Zvi Elpeleg, Through the Eyes of the Mufti: The Essays of Haj Amin

[10] David Cesarini(2013-09-05). Adolf Eichmann

[11] David Cesarini(2013-09-05). Adolf Eichmann.

[12] David Cesarini(2013-09-05). Adolf Eichmann.

[13] Le Yishouv désigne la communauté juive en Palestine avant la création de l’État d’Israël.

[14] En mai 1939, alors que les Juifs sont persécutés par le Troisième Reich, les Britanniques leur réduit l’accès à la Palestine de manière draconienne.

Barenboïm et Ahmadinejad, même combat

Wagner fut un compositeur de premier rang  et un novateur en musique, mais ce n’est pas pour cette raison qu’Hitler l’avait choisi comme un des emblèmes du Troisième Reich. C’était également un écrivain qui avait théorisé l’antisémitisme post-chrétien au moyen d’écrits appelant à l’élimination des Juifs. Il leur reprochait notamment la décadence de la culture européenne, et avait appelé à la « déjudaïsation » de l’Allemagne bien avant l’avènement du nazisme. Son ouvrage  « Les Juifs dans la Musique » fut une contribution majeure à la rationalisation de l’antisémitisme moderne.

En juillet 2001 le chef d’orchestre Daniel Barenboïm s’apprêtait à donner un concert en Israël, mais face au tollé quant à son intention de jouer du Wagner il retira cette partie-là du programme. Le concert eut donc lieu, mais au bout de quelques rappels il demanda au public s’il désirait malgré tout entendre du Wagner. Il y eut de vifs échanges dans la salle, au bout desquels une partie du public en sortit la rage au cœur, ce qui n’empêcha pas Barenboïm d’entamer un extrait de « Tristan et Isolde ».

Même s’il est vrai qu’il faut dissocier l’art de l’artiste, Barenboïm aurait dû comprendre qu’il avait l’obligation morale de respecter l’ostracisme concernant Wagner en Israël, dès lors qu’il y avait encore des rescapés de la Shoah en vie.

L’argument  comme quoi ceux-ci n’étaient pas obligés d’assister à ses concerts ne tient pas, parce que les prestations de Barenboïm, enfant du pays, ne passent pas inaperçues. Il avait donc le droit de jouer du Wagner, mais aussi le devoir de ne pas choquer.

Edward Saïd était un intellectuel américain d’origine palestinienne qui s’est distingué toute sa vie par une hostilité obsessionnelle envers Israël. Ami de Barenboïm, il co-fonda avec lui un orchestre composé d’Arabes et d’Israéliens, avec pour vocation d’établir un pont entre jeunes musiciens  qui autrement n’auraient sans doute jamais eu l’occasion de se connaître. Initiative louable si elle n’avait pas été conçue avec pour objectif de discréditer Israël et d’attiser les passions au lieu de les réduire.

Un des évènements hautement symboliques de cet orchestre fut un concert devant un public palestinien en Cisjordanie. Mais Barenboïm, qui déclarait ne pas vouloir connoter politiquement son orchestre, aurait dû comprendre qu’il avait l’obligation morale de le faire jouer également devant des Juifs de ce même territoire. Finalement il s’avère que ceux-ci  n’y avaient pas droit du seul fait d’être juifs.

La République Islamique d’Iran est une théocratie qui ignore la liberté d’expression, réprime les opposants, pratique la torture, la lapidation, les amputations, discrimine les femmes et les minorités. Ce régime est en guerre ouverte contre Israël par le truchement du Hezbollah et du Hamas, organisations terroristes armées et financées dans le but explicite de rayer Israël de la carte.  Par ailleurs l’Iran est soupçonné par la communauté internationale de développer une arme nucléaire avec Israël pour cible.

La Chancelière d’Allemagne projette ces jours-ci une visite en Iran en vue d’un rapprochement diplomatique et économique entre les deux nations. Barenboïm s’apprête à être du voyage afin de célébrer cet évènement à la tête de l’orchestre de Berlin. Mais il devrait comprendre que se produire sous la bannière de l’Allemagne dans un Iran qui projette d’assassiner six millions de Juifs est un geste qu’il est probablement seul à ne pas en mesurer le poids symbolique.

Le comble c’est qu’aux dernières nouvelles ce sont les autorités iraniennes elles-mêmes qui récusent Barenboïm  parce qu’il est juif, ce qui a le mérite d’être cohérent, puisqu’il  fait  partie de ceux qui sont visés par cette nouvelle Shoah que le régime iranien appelle de ses vœux.

Mais Barenboïm a des atouts dans la vie : en plus d’être un immense musicien, il est à la fois citoyen d’honneur de la Palestine et citoyen de déshonneur d’Israël.

Sortir Israël de l’impasse

La Cisjordanie est sous contrôle israélien depuis la tentative arabe de liquider Israël en 1967, lors de la Guerre des Six-Jours. En septembre de la même année, la Ligue Arabe décrétait à Khartoum ses fameux « Trois Non », à savoir « non à la paix avec Israël, non à la reconnaissance d’Israël, non à la négociation avec Israël ».  C’est suite à cette ukase sans équivoque que fut mise en œuvre la colonisation de la Cisjordanie, poursuivie ensuite par tous les gouvernements israéliens sans exception.

Au fil du temps, la Cisjordanie a fini par constituer un problème à la fois moral et juridique eu égard à l’occupation d’un territoire dont Israël est responsable en vertu du droit international. Mais vu l’absence de volonté politique des dirigeants palestiniens – et de leur obsession à vouloir détruire l’Etat juif – la colonisation s’est transformée petit à petit en dispositif dont la finalité est de définir une fois pour toutes la frontière orientale d’Israël. Mais l’hostilité du monde arabe, la pression internationale, les dissensions au sein de la société israélienne elle-même, tout cela  pourrait à terme devenir intenable. Le processus de paix étant bloqué, il semble de plus en plus probable qu’Israël se verra tôt ou tard dans l’obligation de prendre une initiative unilatérale.

Une manière de le faire pourrait être d’annexer la Cisjordanie, en partie ou en totalité, et d’octroyer la citoyenneté aux palestiniens qui y vivent. Il est possible que beaucoup de palestiniens en seraient d’accord, et deviendraient donc des citoyens israéliens à part entière. Cependant cela risquerait de mettre en péril le caractère juif de l’Etat d’Israël, et donc sa raison d’être. Bien que les Juifs resteraient majoritaire, la démographie palestinienne  pourrait assez vite étouffer la démocratie israélienne. Le Moyen-Orient finirait dans ces conditions par compter un Etat arabe en plus, et un Etat juif en moins. Mais comme il n’y en a qu’un seul, le peuple juif se retrouverait errant comme devant.

A cela il y a peut-être une solution, déjà évoquée par le passé mais qui mériterait peut-être d’être réactualisée vu l’impasse actuelle. Elle consisterait à proposer  la citoyenneté israélienne à tous les Juifs du monde, mais sans obligation d’émigrer comme le stipule actuellement la « Loi du Retour » [1]. Ceux que cela intéresserait introduiraient une demande auprès des ambassades d’Israël, en précisant qu’ils souhaiteraient acquérir la nationalité tout en continuant à résider dans leurs pays respectifs. Les israéliens non-résidents devraient alors être autorisés à participer aux élections législatives (ce qui n’est pas le cas actuellement), ce qui rétablirait l’équilibre entre Arabes et Juifs à la Knesset[2]. Cette accession à la citoyenneté aurait en plus l’avantage de resserrer les liens entre Israël et la Diaspora.

Israël est entouré d’ennemis, mais a acquis auprès de la Communauté Internationale son rang de nation parmi les nations en vertu du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Cependant plus de la moitié du peuple juif vit encore en Diaspora et ne projette pas de s’établir en Israël dans un avenir prévisible. Cependant  la « Loi du Retour » constitue un engagement de l’Etat juif à maintenir ses portes ouvertes quoi qu’il arrive. Mais comme il n’y a pas de droit sans devoir, il y a anomalie à ce qu’Israël soit engagé envers la Diaspora, sans qu’elle-même soit tenue à quoi que ce soit. Un appel d’Israël consistant à offrir aux Juifs la nationalité correspondrait à l’essence même du sionisme, qui est de préserver le seul endroit au monde où les Juifs ne sont ni persécutés, ni détestés, ni tolérés, tout simplement parce qu’ils sont chez eux.

Beaucoup de Juifs soutiennent Israël en lui portant assistance d’une manière ou d’une autre, mais nombreux sont aussi ceux qui n’ont pas la possibilité de manifester leur appui autrement que par des mots. Prendre la nationalité israélienne serait  donc pour ceux-ci un moyen simple de poser un geste fort, et de mettre ainsi leurs actes en accord avec leurs paroles.

[1] La loi du retour garantit à tout Juif le droit d’immigrer en Israël.

[2] Parlement de l’Etat d’Israël.

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